Un scrutin grave et à la fois non-décisif
- Certains pensent encore que l’élection
de Marine Le Pen à la magistrature suprême est possible. S’il est indéniable
que le Front National n’a jamais été aussi proche de la présidence de la
République, il est plus que vraisemblable qu’il n’atteigne pas cet objectif
ultime en cette soirée du 7 mai 2017.
- L’enjeu est alors davantage
celle du partage des voix entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron. Le score du
candidat d’En marche s’élèvera-t-il à 55%-60% ou se rapprochera-t-il de 70% ?
Cette question n’est pas dénuée de toute importance, l’ampleur du retentissement
symbolique de ce scrutin dépendra ainsi considérablement de la force des
suffrages exprimés en faveur de la candidate du FN. Quelle image la société
française se renverra-t-elle non seulement à elle-même mais aussi à l’Europe et
au monde ?
- Enfin dans l’hypothèse même
d’une prise du pouvoir présidentiel par le FN, il convient de rappeler, qu’en
dépit de la pratique présidentialiste de la Constitution actuelle, le président
de la République a nécessairement
besoin d’une majorité parlementaire cohérente et faisant preuve d’un minimum de
discipline afin de l’accompagner dans son action ou du moins de ne pas l’entraver.
Et donc encore une fois, il convient de
rappeler que les élections législatives et la configuration politique qui en
sortira seront décisives à cet égard.
Front républicain contre Front national : un questionnement nécessaire
- La convocation d’un « front
républicain » face à la menace du « Front National » n’est pas
chose nouvelle, ce premier front s’étant déjà donné à voir en 2002 à la faveur
de Jacques Chirac en lui permettant de remporter le second tour de la
présidentielle avec plus de 80% des suffrages.
- 15 années plus tard un
réflexe similaire a animé aussi bien nombre de femmes et hommes politiques que
de composantes de la société civile (ONG, organes de presse, professions
libérales…) ou encore d’agents publics en vue d’appeler à « faire barrage »
à Marine Le Pen, et notamment à inciter les abstentionnistes (en ce compris les
votes blancs) à se rendre aux urnes pour voter.
- Sur la forme ce réflexe n’est
pas critiquable en tant que tel (1), même si j’estime que le vote est un acte
avant tout individuel que le citoyen accomplit en son âme et conscience dans le
secret de l’isoloir. Et à certains égards, les postures incantatoires ou
consistant en des injonctions peuvent se révéler contre-productives: le « front
républicain » devant, selon nous, davantage relever d’une éthique individuelle
que d’une morale collective.
- Il ne sert à rien non plus
de diaboliser l’adversaire, il convient de le traiter comme un adversaire légitime
- aussi longtemps qu’il ne fait pas l’objet d’une interdiction. Le débat du 3
mai 2017 a été salutaire à cet égard, puisqu' il a permis de montrer l’inconsistance
totale et la fébrilité extrême de Marine Le Pen (2).
- En cela, la constitution et
la mise en œuvre renouvelée d’un tel front (républicain) ne doit pas faire l’économie
d’une réflexion critique sur les dynamiques qui ont conduit la société
française à ce 2nd tour. S’il doit y avoir combat, il ne saurait selon
nous se résumer à une bataille « organique » contre l’« entité »
Front National mais devrait, de façon plus large, être engagée sur le terrain « substantiel »
des idées. Ainsi ce n’est pas tant le FN qui s’est banalisé, que ses idées, notamment
sur la question identitaire. Les journalistes Raphaëlle Bacqué et Ariane Chemin
ont fait ressortir cette banalisation dans leur article en date du 5 mai 2017 :
Comment
les idées du FN se sont installées dans l'air du temps. Ce constat n’est
pas inédit et le phénomène touche tant la droite que la gauche de l’échiquier
politique qui se disent pourtant « républicains ».
En espérant que cette soirée du 7 mai 2017 constitue un commencement pour une prise de conscience massive et ne se conclue
pas simplement par l’extinction du réflexe « front républicain ».
(1) Encore qu’une critique puisse
être admise lorsqu’un tel réflexe est mis en œuvre par des agents publics s’exprimant
ès qualité étant donné qu’ils sont en principe astreints à une obligation de
réserve et un devoir de neutralité, mais aussi au respect de l’égalité devant
la loi qui commande une stricte égalité de traitement des candidats nonobstant
leur couleur politique.
(2) A ce sujet, il peut être
constaté qu’une certaine posture de retrait ou de silence relatif a été un
aspect de la stratégie d’ascension électorale du FN qui lui a plutôt réussi ces
dernières années… jusqu’au fameux débat de l’entre-deux tours qui risque de ne
pas être sans conséquence aussi en interne, au Front National.
RépondreSupprimerDébat de l’entre-deux-tours : retour sur les coulisses du naufrage de Marine Le Pen
http://www.lemonde.fr/m-actu/article/2017/07/14/debat-de-l-entre-deux-tours-et-marine-le-pen-sombra-devant-16-millions-de-telespectateurs_5160709_4497186.html
" Pas question de renoncer à se présenter pour la troisième fois à la présidentielle en 2022, après les cinq tentatives paternelles. « La politique, ce n'est pas une photo, c'est un film, affirme-t-elle. Après son deuxième échec à la présidentielle, on a enterré Chirac, tout le monde voulait sa peau au RPR. Et après 2007, personne ne pariait un kopeck sur Hollande. » "
Ça ne sera certainement pas aussi facile...
https://www.lci.fr/replay/l-invite-politique-de-24h-pujadas-l-info-en-questions-du-28-novembre-2017-robert-bourgi-avocat-au-barreau-de-paris-2071861.html
RépondreSupprimerL'invité politique de 24H Pujadas, l'info en questions du 28 novembre 2017 : Robert Bourgi, avocat au barreau de Paris
Quels contre-pouvoirs en Macronie ?
RépondreSupprimerhttps://aoc.media/opinion/2019/03/18/contre-pouvoirs-macronie/
L’impasse post-politique – libéralisme vs populisme 1.
https://aoc.media/analyse/2019/05/28/limpasse-post-politique-1-liberalisme-vs-populisme/
Le piège épistocratique – libéralisme vs populisme 2
https://aoc.media/analyse/2019/05/29/le-piege-epistocratique-liberalisme-vs-populisme-2/